- Toi je t'oublie toujours.
Nous étions rassemblés dans le hangar qui nous servait alors de garage. C'était l'heure inondée de soleil, l'heure des aurevoir, chacun souhaitant à l'autre une bonne route, une bonne continuation, deux ou trois, quatre bises, c'est selon la région... Je me souviens quelle douleur fulgurante comme à chaque fois, à chaque fois, que j'avais droit à cette tardive reconnaissance. Et puis le doute.
- Aubain, excuse-moi, je te téléphone cet après-midi, mais c'est si difficle. Non de d'y penser parce que j'ai cent fois passé dans ma mémoire ces moments. Mais de l'écrire, me résoudre à nommer...
Et ce jour-là, dans ce hangar baigné de soleil, alors que j'avais atteint largement l'âge d'être adulte, je m'étais dit:
- Et si ce n'était de sa part qu'un calcul, qu'une méchanceté? si c'était volontaire?
Je songeais avec tristesse que je parlais de ma mère.
Il vint à ma rescousse:
- Il n'est jamais trop tard, me dit-il.
J'en étais intiment persuadée, sinon comment aurais-je survécu? Comment aujourd'hui continuerai-je à traiter la maladie avec dédain, à en parler comme d'une banalité? A rire. Mais c'était important de l'entendre dire. Les paroles d'Aubain et son immense confiance me réconfortaient.
C'était à ce moment-là, alors que je n'avait pas encore reposé le téléphone sur son support qu'elle entra dans mon bureau. Je ne l'avais pas entendu frapper.
- On peut renaître à tout âge et se sentir plus jeune qu'on n'a jamais été, me dit-elle.
Je rendis compte à ce moment là que le soleil entrait dans la pièce encombrée de dossiers, et je souris.
Commentaires
Rebonjour, ça m'a fait très plaisir que vous ayez repris mon commentaire. Je continue à lire vos carnets avec beaucoup d'intérêt,
Bonne écriture!
Léa
Magnifiques textes. Bon samedi.